Par Asif Arif
Monsieur le Président de la République Française,
Récemment, vous avez pris des positions importantes concernant l’islam de France et vous avez, à ce titre, rencontré plusieurs personnalités publiques pour parler, en termes techniques, de la structuration de l’islam en France. Mais rarement, lors de vos rencontres et discussions politiques j’ai décelé une vraie volonté de connaitre le Prophète central de notre communauté, le Prophète Mohammad. Il ne s’agit pas là de discuter de la bonne ou mauvaise foi de vos intentions, qui me sont indifférentes.
Sans le Prophète de l’islam, il est impossible de comprendre l’islam et de comprendre ce pour quoi il incarne davantage qu’une simple figure paternelle pour les musulmans de France. Je tenais à prendre le temps d’une tribune – et peut être prendriez-vous le temps d’un café pour la lire – afin de vous rapporter les raisons de cet attachement indéfectible et de cet amour incommensurable que nous avons pour notre Prophète.
Lorsque nous ne savions même pas ce que l’écriture représentait, le Prophète de l’islam nous a enseigné à lire le Coran, de prendre la plume, de comprendre et de réfléchir sur l’orientation de la Terre, de nous abreuver de méditations. Lorsque nous ne savions même pas qui étaient les chrétiens, c’est le Prophète de l’islam qui nous a enseigné que Jésus (Isa) était un Prophète aimé de Dieu et que la Vierge Marie (Maryam) était sa mère. Lorsque nous ne savions pas faire autre chose que de déifier des dieux, c’est le Prophète de l’islam qui nous a enjoint d’abandonner ces pratiques et de regarder l’histoire des Talmuds, du Pharaon à l’époque de Moïse, des peuples qui ont vu leurs civilisations, pourtant à leur apogée, sombrer en raison des abus et des excès.
C’est le Prophète de l’islam qui, lorsque le cortège funéraire d’un juif passait, s’est levé en signe de respect vis-à-vis de ce dernier. C’est encore lui qui a octroyé la Charte de Médine bien plus favorable aux non-musulmans qu’aux musulmans eux-mêmes ; c’est également lui qui avait concédé aux chrétiens du Mont Sinaï un accord scellant à vie un traité de paix entre les musulmans et les chrétiens. C’est encore le Prophète de l’islam qui avait, alors qu’une délégation chrétienne le visita, proposé à ces derniers de prier dans une mosquée qui est un lieu où nous implorons le même Dieu que celui des chrétiens.
Le Prophète de l’islam nous a appris la modération, le respect de la famille, le respect de la mère, du père, des veuves, de l’orphelin, du pauvre et du démuni. Il nous a enseigné à toujours encourager la justice, quand bien même la justice nous impose de faire des concessions importantes sur nos droits qui pourtant seraient justes et équitables. Il nous a ensuite expliqué et prouvé l’existence de Dieu. Il nous a démontré qu’il n’existe aucune différence entre l’homme et la femme, sauf en ce qui concerne les bonnes actions. Il nous a enjoint de traiter les femmes avec respect, en sauvegardant leur dignité, en leur accordant tous les droits dont elles disposent (l’héritage, notamment).
Alors que vous pensiez à répondre à ceux qui ont fait du tort à Samuel Patty en diffusant les caricatures de ce Prophète sur les frontons de certaines mairies, nous sommes désolés de voir que nos instances représentatives n’ont pas pu vous présenter ces éléments qui définissent l’identité des musulmans de France.
Le Prophète de l’islam, qui est régulièrement caricaturé, était bien plus qu’un père de ce monde pour nous ; il fut un père spirituel, qui nous a enseigné des valeurs morales excellentes sans lesquelles nous ne serions pas mieux que certains groupes aux manières barbares. Les musulmans abondent en galanterie grâce aux enseignements du Prophète de l’islam et devraient être parmi ceux qui respectent au plus la société dans laquelle nous vivons.
Si certains musulmans, en empruntant le nom de ce Prophète, commettent des exactions contre ses enseignements ou ne les suivent pas correctement, pourquoi tenir en caution l’ensemble des musulmans de France ? Encore une fois, Monsieur le Président de la République, votre dignité et celle de vos administrés ne fusionnent que lorsque notre société apprend à être tolérante et sait dresser des séparations claires entre le sacré et le politique.
Je tenais à vous faire connaitre ma disponibilité pour vous démontrer que l’islam n’est pas en crise, ainsi que vous l’avez soutenu ; mais la France, si.
A propos de l’auteur : Asif Arif est avocat au Barreau de Paris, et auteur de plusieurs ouvrages sur l’islam et la laïcité.
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