Femme

La pudeur : une affaire de tous

« Chaque religion a une caractéristique distincte et celle de l’Islam, c’est la pudeur. » (Sunan Ibn Majah, 4181)

Par Tayyeba Batool Inder, Maurice

La mort de la jeune Mahsa Amini le 16 septembre 2022, entraînant un chaos dans la société civile avec maintes protestations et manifestations, a lancé plusieurs fois le débat autour du port du voile islamique sur la scène internationale. Entre les États qui veulent l’imposer de force et les États qui tentent par des moyens juridiques de l’interdire tout simplement, les droits des femmes qui sont principalement concernées sont bafoués à tout bout de chemin.

Bien que l’instruction de se couvrir soit un commandement coranique obligatoire, la stérilité du débat dans l’actualité réside dans le fait que tout ce bruit se fasse en passant à côté de l’essentiel. En effet, sous-jacent à cette instruction, ce qui est recherché par l’Islam, c’est bien la préservation de la pudeur dans la société. Cela concerne bien évidemment les femmes, mais d’abord et avant tout, c’est aux hommes qu’Allah s’est adressé dans le Saint Coran.

« Dis aux croyants de restreindre leurs regards et de préserver leurs parties intimes […] »1

L’objectif est bien non équivoque ; restreindre le regard et préserver les parties intimes sont en premier plan dans la sphère de la pudeur. Qu’entendons-nous par pudeur ? La pudeur se définit comme tout ce qui nous empêche de nous adonner à des actes répréhensibles, blâmables, aux turpitudes dont la finalité ne causera que de la gêne et de la honte. Cela englobe donc simultanément bienséance, décence, dignité, discrétion, humilité, modestie, réserve, retenue.

Pourquoi la pudeur dérange-t-elle autant ? Il demeure évident de nos jours qu’une campagne anti-pudeur fait rage sur tous les fronts, et ce depuis un certain temps déjà. Littérature, musique, télévision, cinéma, publicités, entre autres, et plus récemment, réseaux sociaux ; toutes les plateformes sont exploitées à fond dans cette dite campagne afin de façonner l’opinion, et dans le long terme, la société, selon des paramètres très différents de ceux imposés par la pudeur.

Au nom de la liberté, la société est portée sur une vague qui la mène lentement mais sûrement vers l’immoralité. D’abord on a commencé par objectifier la femme : on la dénude, on la rend attirante, bref on fait d’elle l’objet de tous les désirs. Puis, on a commencé à lui dire qu’elle peut se mettre en couple avec les partenaires de son choix, en dehors des liens sacrés du mariage ; ici non seulement sont concernées les personnes non mariées, mais également celles qui le sont, encourageant à la fois la fornication et l’adultère. 

Quand tout cela est devenu la norme, vers quelle nouvelle dérive se tourner, poussant perpétuellement plus loin les limites de l’acceptable ? À ce point, on impose l’idée de la négation du divin — puisqu’il n’y a pas de Dieu, donc pas de compte à rendre à quiconque éventuellement, tout est donc permis car ce qu’on peut appeler les limites morales deviennent finalement caduques. Émergent ainsi à grande échelle, comme des champignons, des phénomènes tels que la pédophilie et l’homosexualité. 

Aujourd’hui nous avons atteint des limites où plus rien n’est tabou. Dépassant même l’homosexualité, la société en est arrivée à la négation du genre tout simplement. On commence à inculquer aux enfants, à travers des dessins animés, voire aussi dans certains cursus scolaires, que le « concept » LGBTQ+ demeure une partie intégrante de notre civilisation. On veut leur faire croire que tout cela est normal, en brandissant l’étendard de la liberté, en proclamant la désuétude de la pudeur.

Mais parallèlement, nous témoignons également aujourd’hui les faillites sociales et sociétales de ce mode de vie, notamment par exemple, à travers le phénomène #MeToo qui dénonce l’objectification de la femme et de son image à outrance, faisant d’elle ce qu’on a appelé la femme-objet et menant à maintes agressions. Il semble que les limites de l’acceptable ont bien été franchies. D’autre part, la cellule familiale n’est plus ce qu’elle était jadis, entraînant son lot de problèmes non seulement pour les adultes concernés, mais surtout pour les enfants qui s’y retrouvent coincés. 

À la lumière des conséquences apparentes de nos jours, l’on se rend compte que l’Islam attaque tous ces fléaux à la source même, en enjoignant aux hommes et aux femmes de restreindre leurs regards et de préserver leurs parties intimes. Tel est le principe. S’ensuit le mode d’application, où l’injonction est faite aux femmes de se couvrir. Si l’on souhaite protéger la génération de demain contre de telles dérives comme décrites plus haut, c’est maintenant qu’il faut impérativement mettre en pratique les enseignements du Saint Coran.

C’est dans le chapitre 24 du Saint Coran qu’Allah impose les restrictions relatives au regard et à la protection des parties intimes. Le chapitre s’ouvre ainsi : « Ceci est une sourate que Nous avons révélée, et que Nous avons rendue obligatoire ; et Nous y avons révélé des commandements clairs, afin que vous preniez garde. »2 Il mérite d’être souligné ici que le caractère obligatoire des injonctions qui vont suivre dans ce chapitre est explicitement énoncé. Ce qui veut donc dire que quiconque se considère musulman et croit dans le Saint Coran a l’obligation de se plier à ces commandements. Au-delà du champ de ce qui demeure souhaitable, nous nous retrouvons dans le champ de ce qui est impératif, obligatoire.

« Dis aux croyants de restreindre leurs regards et de préserver leurs parties intimes. Cela est plus pur pour eux. Assurément, Allah est bien au courant de ce qu’ils font. 

Et dis aux croyantes qu’elles restreignent leurs yeux et veillent sur leurs parties intimes, et elles ne doivent pas exposer leur beauté naturelle et ses parures, excepté ce qui en est apparent de soi, et qu’elles tirent leurs couvertures de tête sur leurs poitrines […] »3

La lecture des versets cités démontre clairement que l’ordre donné aux femmes de se couvrir a pour but primaire la protection de leur intimité. C’est le moyen établi par Allah pour les aider à préserver leur pudeur et leur dignité. Il y a bien un objectif derrière le voile que la femme musulmane est tenue de porter. Ce qui implique que le voile ne se résume pas à un symbole identitaire d’appartenance à l’Islam. Les femmes voilées qui s’adonnent à de libres interactions sans retenue avec des hommes, conversant avec familiarité, ne sont pas en train d’atteindre le but fixé par Allah, c’est-à-dire que leur voile ne sert à rien car l’élément de pudeur ne figure plus dans l’équation. Vice versa, il en va de même pour les hommes croyants qui se livrent à de libres échanges avec des femmes sans réserve quelconque : ils sont en train de bafouer cette pudeur qu’Allah a rendue obligatoire.

L’Islam n’a que faire d’un banal morceau de tissus que l’on porte sur la tête, si au fond l’esprit de pudeur qui doit s’y rattacher n’y est pas. Autour de nous, il y a un certain laxisme grandissant quant aux règles relatives à la pudeur, concernant à la fois l’habillement des femmes et la retenue dont tout musulman et musulmane doit faire preuve. Il est grand temps que tout un chacun redouble d’efforts afin de mettre en pratique stricto sensu les commandements d’Allah à ce sujet car l’enjeu est de taille ; il en va du destin de toute notre génération à venir. Sommes-nous prêts à faire l’effort nécessaire afin de la protéger, ou allons-nous la laisser emporter par cette vague qui mène la société vers l’immoralité absolue ? 


À propos de l’auteure : Tayyeba Batool Inder est une Mauricienne de confession musulmane. Elle détient une double licence en Droit mention Sciences Politiques et en Histoire, Civilisations et Enjeux Internationaux de l’Université Paris-Sorbonne à Abu Dhabi. Elle participe activement à la rédaction de contenu et production pour la chaîne MTA International.


  1. Le Saint Coran, ch.24, v.31 ↩︎
  2. Le Saint Coran, ch.24, v.2 ↩︎
  3. Le Saint Coran, ch.24, v.31-32 ↩︎