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Au-delà du handicap : une autre forme de beauté qui enrichit l’humanité

Prisonnière de standards étroits et d’un regard souvent discriminant, la société peine encore à reconnaître la valeur des personnes handicapées. Ce défi appelle à une transformation du regard, où la dignité humaine et l’inclusion deviennent des principes fondamentaux.
Habeeba Hajrah Jeeawody, de l’île Maurice

La société a longtemps défini la beauté selon des standards très étroits basés sur l’apparence physique. Pourtant, la véritable beauté réside souvent dans l’authenticité, la résilience et l’humanité. Les personnes handicapées défient ces normes et montrent que la beauté ne se limite pas à l’apparence physique. Prenons l’exemple extraordinaire de Stephen Hawking, de Ludwig van Beethoven ou encore des athlètes paralympiques, qui démontrent que leur rayonnement vient de leur histoire et de leur persévérance autant que de leur handicap.

Certains handicaps ne peuvent pas être vus à l’œil nu, comme les handicaps mentaux, cognitifs ou sensoriels (lorsque les sens visuel ou auditif sont affectés). Selon l’Organisation mondiale de la santé, 1,3 milliard de personnes (soit une personne sur six dans le monde) souffrent d’un handicap important, et elles sont ainsi limitées dans leur fonctionnement quotidien.

C’est une réalité que l’un des plus grands défis consiste à changer le regard de la société envers les personnes handicapées, car elles sont souvent victimes de stigmatisation et de discrimination, notamment par rapport aux normes sociales ou à leurs capacités. Cependant, le handicap n’enlève rien à la valeur, à la beauté ou à la dignité d’une personne. Au contraire, il révèle des dimensions souvent invisibles : l’humour, la gentillesse, la créativité et l’humanité, entre autres.

Ainsi, la beauté des personnes handicapées n’est pas une exception ou une forme de pitié magnifiée ; au contraire, c’est une beauté authentique, unique et profondément humaine. Elle nous rappelle que chaque personne mérite d’être vue, respectée et célébrée.

Le handicap: une épreuve noble dans la foi islamique

En Islam, le handicap est reconnu comme une composante de la condition humaine. Le Saint Coran et les enseignements du Saint Prophète Mohammad (s.a.w.) mettent l’accent sur le traitement équitable et respectueux des personnes handicapées. L’Islam souligne l’importance de prendre soin des personnes handicapées, de les intégrer dans la société et de leur accorder des droits et des opportunités égaux.

L’Islam enseigne que l’on ne doit pas rester insensible aux douleurs des autres et que l’on doit aider les plus faibles, et non pas se moquer d’eux. À ce propos, Sa Sainteté le Calife de la Communauté musulmane Ahmadiyya (a.b.a.) a mis l’accent sur le fait que les membres de sa communauté et les volontaires doivent toujours être prêts à essuyer les larmes de ceux qui sont en détresse ou qui sont persécutés, ainsi que celles des innocents victimes des circonstances, afin de les aider à surmonter leurs malheurs et leurs chagrins. Il a ajouté que l’on doit toujours se battre pour les droits des plus faibles, des vulnérables et des moins privilégiés.[1]

Le Saint Prophète Mohammad (s.a.w.) avait montré par l’exemple que le handicap n’est pas un obstacle à la compétence ou à la valeur humaine en confiant à Ibn Umm Maktoum, qui était aveugle, la direction de Médine en son absence.

D’ailleurs, le Saint Coran insiste sur le droit à l’inclusion, à la dignité et à la valorisation spirituelle de chaque individu. À ce sujet, Dieu dit dans le Saint Coran :

« Il n’y aura aucun reproche à l’aveugle, ni aucun reproche au boiteux, ni aucun reproche au malade, s’ils ne partent pas au combat…»[2]

Ce verset du Saint Coran atteste clairement de la compassion divine et de la justice de Dieu. Il reconnaît que certaines personnes ont des limitations physiques qui les empêchent de participer à des efforts comme le jihad ou d’autres devoirs communautaires, et que la valeur spirituelle d’un individu ne dépend pas de ses capacités physiques. Ainsi, cela reflète un principe d’équité dans l’Islam, c’est-à-dire que Dieu n’impose pas aux individus ce qu’ils sont incapables de faire, comme le confirme ce verset suivant du Saint Coran:

« Allah ne charge aucune âme au-delà de ses capacités. »[3]

En outre, Dieu, la Source de Paix, nous enseigne également que les personnes âgées, les veuves, les orphelins, les personnes handicapées, les pauvres et les nécessiteux doivent recevoir toute l’aide financière et émotionnelle nécessaire. Ces enseignements, parmi tant d’autres venant du Dieu Gracieux, posent les fondations d’une société pacifique, reposant sur les bases solides de la justice, de la bienveillance, de l’amour mutuel, du respect de la vie humaine, du respect des lois et de l’ordre, ainsi que du service rendu aux autres.[4]

La souffrance et le défi des handicapés

Chaque jour est une lutte pour les personnes handicapées. Parfois, la vie peut leur paraître amère et dépourvue de sens, marquée par la tristesse et le désespoir, les nuits blanches, les rendez-vous et traitements médicaux interminables, les douleurs atroces et le regard incompréhensif des autres, qui les fragilise dans de telles circonstances. Cela demande beaucoup de courage et de résilience pour faire face à cette situation et à la vie elle-même. La question souvent posée par les personnes handicapées est : « Pourquoi moi ? » ou « Pourquoi Dieu est-Il injuste ? »

Même dans les moments les plus difficiles de la vie, le Saint Coran nous enseigne à faire preuve de patience et de persévérance, et à toujours trouver le réconfort dans le souvenir de Dieu, comme le démontre ce verset:

« Et certainement Nous vous éprouverons en vous affligeant un peu de crainte, de faim, de pertes de biens et de vies, et de récoltes, mais annonce la bonne nouvelle à ceux qui persévèrent patiemment, qui, quand un malheur les frappe, disent : ‘Assurément, nous appartenons à Allāh, et certainement c’est à Lui que nous retournerons.’»[5]

Les souffrances, réelles ou perçues, aussi douloureuses soient-elles, nous rappellent une vérité essentielle : tout dans ce monde est transitoire. La vie que nous menons ici-bas n’est qu’un passage, une existence temporaire. La véritable vie est celle de l’au-delà, et c’est vers elle que doit tendre notre cheminement. Le Messie Promis (a.s.), fondateur de la communauté musulmane Ahmadiyya, déclare :

« Il devrait nous suffire de savoir que l’univers actuel n’est qu’un stade bref et transitoire de l’existence, annonçant une vie plus pleine à venir, où tous seront comblés d’une félicité véritable et éternelle. Ainsi, toute épreuve supportée ici-bas sera pleinement compensée et chaque manque comblé. »[6]

Ainsi, les souffrances que nous traversons ici seront récompensées par Dieu, le Tout-Puissant. En réalité, la religion ne nous enseigne pas que nos souffrances sont proportionnelles à notre bonté. Au contraire, elle affirme que c’est notre réaction face à la souffrance qui révèle notre véritable valeur morale. Les épreuves nous aident à développer la constance dans l’adversité, à affronter la maladie avec courage et à apprendre la patience au cœur même du chagrin et des plaintes. Ainsi, on comprend que la vraie paix durable ne peut venir que de Dieu, Celui qui est éternel, sans faille et qui ne déçoit jamais.

À cet effet, le Saint Prophète (s.a.w.) a dit : « Pour un musulman, la vie est remplie de bien. Seul un vrai croyant se trouve dans cette position ; car, s’il rencontre le succès, il est reconnaissant à Dieu et devient le bénéficiaire de plus grandes faveurs divines. D’autre part, s’il endure le malheur et la souffrance, il les supporte avec patience et mérite ainsi les faveurs de Dieu. »[7]

Le handicap: une force et non pas une limite

Certes, vivre avec un handicap n’est pas quelque chose que tout le monde peut affronter facilement. Cela demande une force intérieure et une confiance en soi, afin de renforcer l’estime de soi pour pouvoir affronter ses peurs, le regard des autres ainsi que les défis quotidiens, et pour se dire que l’on est plus fort que tout cela et que l’on a du potentiel comme les autres.

Avec un accompagnement et un environnement bienveillant, beaucoup de personnes handicapées parviennent à s’épanouir pleinement dans différents domaines de la vie, même s’il reste encore des améliorations à apporter en ce sens.

Afin de promouvoir l’égalité des chances et des opportunités parmi les personnes en situation de handicap dans toutes les sphères de la vie, la société doit mettre en place des stratégies durables, adaptées à leurs besoins et à leurs limitations, afin de les intégrer pleinement dans la société dans son ensemble. La loi doit également être renforcée contre la discrimination envers les personnes handicapées. Tant que l’égalité ne sera pas une réalité pour tous, le combat continue — et il nous concerne tous.

Il est indéniable que les personnes en situation de handicap doivent s’unir et faire entendre leur voix avec force et clarté, afin de revendiquer leurs droits, de déconstruire les stéréotypes et de réclamer une société véritablement inclusive, où chacun est reconnu pour ses compétences et non défini par ses limitations.

À propos de l’auteure: Habeeba Hajrah Jeeawody, Mauricienne, est titulaire d’une maîtrise en psychologie managériale de l’Université de Technologie de Maurice, ainsi que d’une licence en sécurité et qualité alimentaires de l’Université de Maurice. Elle travaille au sein de l’État mauricien depuis huit ans et a servi comme Sadr Lajna pour la région de Triolet, à Maurice, de 2022 à 2024. Elle occupe actuellement diverses responsabilités au sein de plusieurs départements de la Lajna Ima’illah locale.


[1] Organisation Mondiale de la Santé (2023).

[2] Le Saint Coran, 48:18

[3] Saint Coran, 2:286

[4] Extrait de “Allah – As-Salam: The Source of Peace!” https://www.alislam.org/library/articles/Allah-As-Salam-The-Source-of-Peace-WCJSUSA2012.pdf

[5] Le Saint Coran, 2:156-157

[6] Malfuzat Vol 5 P. 618 Edition 1988 (publié à l’origine dans le Journal Al Hakam les 30 Mai 1908, 6 Juin et 14 Juin 1908. Reproduit dans The Review of Religions, Mai 1939)

[7] La Vie de Mohammad s.a.w., par Hazrat Mirza Bashir-Ud-Din Mahmud Ahmad r.a., page 243

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