Islam

L’importance du Ramadan

Le jeûne du Ramadan.
Le jeûne du Ramadan est un des pilliers de l'Islam. Les musulmans jeûnent au cours du 9e mois du calendrier islamique.
Le jeûne du mois du Ramadan se limite-t-il à s’affamer ou à s’assoiffer ? Ou est-ce un exercice éminemment spirituel offrant au croyant des faveurs illimitées ?

La définition générale du jeûne est de « s’abstenir de tout ou de certains aliments et boissons, conformément à une pratique religieuse ».1 Cette affirmation décrit certes l’acte du jeûne, sans présenter cependant son essence.

Étant donné que toutes les religions du monde préconisent le jeûne, sa portée dépasse de loin la simple privation volontaire de nourriture. Historiquement, le jeûne fut également utilisé comme « un moyen pour protester contre des violations des principes sociaux, éthiques ou politiques ».2

À titre d’exemple, Mahatma Gandhi y eut recours pour exercer une pression morale sur ses adversaires politiques : cette tactique fut efficace et largement médiatisée. Selon les religions du monde, le jeûne est principalement une mode d’autoréflexion et de conditionnement moral favorisant le progrès spirituel.

Le jeûne selon les religions du monde

Le jeûne n’est pas une innovation in­troduite par l’Islam. Le Saint Coran déclare en effet : « Ô vous qui croyez, le jeûne vous est prescrit tout comme il a été prescrit à vos devanciers, afin que vous soyez à l’abri du mal. »3 Ainsi, le jeûne en Islam est la continuation d’une pratique des religions antérieures.

Hindouisme

Dans l’Hindouisme, le jeûne est connu comme Upavasa. Il s’agit de l’expression commune de l’engagement religieux et il est accompli dans le cadre d’une routine ascétique. Un jeûne peut aller de l’abstinence complète de toute nourriture et boisson, à celle d’aliments spécifiques ou à une consommation réduite de nourriture pendant une certaine période.

Les jeûnes complets sont généralement pratiqués par les ascètes et les dévots, tandis que des formes de jeûne plus simples et plus souples existent pour les autres fidèles. Upavasa peut également se référer à une abstention de toute forme de plaisir sensuel. 4

Judaïsme

Les juifs observent plusieurs jeûnes annuels. Le grand jeûne de Yom Kippour consiste à s’abstenir de manger et de boire, de se laver, d’utiliser des onguents et des crèmes, de porter des chaussures en cuir et d’éviter toute relation sexuelle. Ce jeûne est encadré par deux repas en famille : il décourage l’ascétisme et préconise un dîner avant le jeûne. Les fidèles sont invités à abandonner le confort de leurs maisons et à se consacrer aux prières dans les synagogues.5

Le jeûne est appelé « l’humiliation de l’âme » par la Torah6 et est pratiqué pour plusieurs raisons : pour commémorer la délivrance des Hébreux de Pharaon, pour expier les péchés et dans l’espoir d’obtenir un jugement favorable7. On dit que Moïseas jeûna deux fois durant sa vie pendant une période de quarante jours chacune – la première fois avant de recevoir les tablettes sur le mont Sinaï et la deuxième fois en découvrant que les Hébreux s’adonnaient à l’idolâtrie.8

Bouddhisme

Selon les traditions bouddhistes après avoir exploré diverses formes d’ascétisme extrême, Bouddha se souvint d’une expérience méditative intérieure de son enfance et comprit que les pratiques excessives n’étaient pas nécessaires à l’élévation spirituelle. Après avoir réduit sa consommation de nourriture à quelques gouttes de soupe par jour, il décida de recommencer à manger, en quantité modérée, pour adopter un régime non fastueux mais suffisant pour soutenir le corps9. Bien que diverses formes de jeûne existent parmi les écoles de pensée bouddhistes, elles ne sont pas obligatoires pour les adeptes de cette foi. Certains moines et nonnes bouddhistes croient que de longues périodes de jeûne sont bénéfiques et jeûnent pendant au moins 18 jours en consommant de petites quantités d’eau. À l’opposé de cette pratique extrême, d’autres bouddhistes considèrent qu’éviter la consommation de viande et de produits laitiers est une forme de jeûne. Une pratique plus modérée consiste à s’abstenir de nourriture et de boisson après midi durant certains jours du mois.10

Christianisme

Dans le Christianisme, le jeûne est observé pendant le Carême avant Pâques et lors de l’Avent, période précédant la Noël.11 Le Carême prévoit un jeûne de 40 jours (à l’exclusion des dimanches) à l’instar du jeûne de Jésus-Christ dans le désert12. Au début du Christianisme, les règles du jeûne étaient strictes – un seul repas par jour était autorisé le soir, et la viande, le poisson, les œufs et le beurre étaient interdits. Ces règles ont été modifiées par l’Église catholique pendant la Seconde Guerre mondiale. À présent, deux jours seulement sont prescrits : le mercredi des Cendres (marquant le début du Carême) et le Vendredi saint (jour commémorant la crucifixion de Jésus Christ).13

L’essence du jeûne en Islam

Selon l’Islam, le jeûne n’est pas un simple exercice physique : il est éminemment spirituel et son but est la quête du plaisir de Dieu en conformant sa vie à Ses directives. Expliquant l’essence de cet acte en Islam, Mirza Ghulam Ahmadas, le Messie Promis et Fondateur de la communauté musulmane Ahmadiyya, déclare : « Le jeûne ne signifie pas uniquement s’affamer et s’assoiffer : sa réalité et son impact peuvent être ressentis par l’expérience. Selon la nature humaine, moins on mange, plus l’esprit est purifié et l’aptitude à voir des visions s’affine davantage. Dieu désire diminuer un type de nourriture et en augmenter un autre. Celui qui jeûne doit comprendre que son objectif n’est pas de s’affamer et de s’assoiffer. Il doit se consacrer au souvenir de Dieu afin qu’il puisse couper ses liens avec ce bas monde et se tourner vers son Créateur. L’objectif est d’abandonner un type de subsistance qui suffit à nourrir le corps charnel et à acquérir un autre aliment, source de confort et de satisfaction pour l’âme. Ceux qui jeûnent uniquement pour l’amour divin et non pas par tradition doivent louer Dieu, Le glorifier et proclamer Son unicité. » 14

Proférer des grossièretés et commettre des actions condamnables annulent l’objectif même du jeûne en Islam. Le Saint Prophète Mohammadsa enseigne : « Allah n’a que faire du jeûne de celui qui n’évite pas le mensonge et la duperie. »15 

De plus, le jeûne vise à inculquer aux musulmans la maîtrise de soi et une vie productive. Selon le Saint Prophète Mohammadsa, Dieu le Tout-puissant déclare : « Tous les actes de l’homme sont accomplis pour sa propre personne, à l’exception du jeûne qui est pour Moi et J’en suis la récompense. Le jeûne est un bouclier ; aussi, lorsque vous jeûnez, évitez de proférer des paroles oiseuses ou de vociférer. Si quelqu’un vous insulte et vous cherche querelle, répondez-lui : « Je jeûne. » »16

Il est conseillé au musulman qui jeûne de passer la majorité de son temps à remplir ses devoirs envers Dieu et Sa création. Il devrait être plus attentif aux cinq prières obligatoires et s’efforcer d’accomplir des prières facultatives à l’instar du Tahajjoud. Le Saint Prophète Mohammadsa en souligne l’importance en ces termes : « Quiconque accompli la prière Tahajjoud pendant le mois de Ramadan avec une foi ferme et l’intention d’atteindre le plaisir de Dieu verra tous ses péchés antérieurs pardonnés. »18

Le Ramadan : mois de bienfaisance

En sus de l’accent mis sur la spiritualité, l’Islam souligne l’importance du bien-être de la société. Œuvrer en faveur de la prospérité de l’humanité est une ambition qu’il souhaite inculquer aux musulmans et le jeûne du Ramadan s’en fait l’écho. Sa Sainteté Mirza Masroor Ahmadaba, le Calife de l’Islam et le chef de la communauté musulmane Ahmadiyya, explique : « Le Ramadan est aussi un moyen pour embellir la société, en favorisant l’esprit de sacrifice et le partage. Le Saint Prophète Mohammadsa nous sert d’exemple encore une fois : au cours du Ramadan ses aumônes prenaient une telle ampleur qu’elles ressemblaient à des rafales de vent. Il incombe au croyant de l’émuler, car c’est là un moyen pour mettre fin à tous remous au sein de la société. Le croyant doit ressentir la souffrance de son frère et lui être compatissant. Ces sentiments engendreront dans leur sillage la reconnaissance et l’affection. »19

Le jeûne du Ramadan est-il obligatoire ?

L’Islam prescrit le jeûne à tous les adultes musulmans afin qu’ils atteignent de hauts rangs spirituels. Il ne souhaite cependant pas que le jeûne soit un fardeau pour ceux qui ne peuvent l’accomplir. Ainsi les malades ou les voyageurs en sont exemptés pendant le Ramadan, mais ils doivent remplacer plus tard les jeûnes manqués.20 Les femmes enceintes, allaitantes  ou celles en période de menstruation en sont également dispensées.

Les musulmans qui ne peuvent pas remplacer les jeûnes manqués doivent payer la fidya, c’est-à-dire nourrir les pauvres et les démunis, selon leurs moyens.21 Cette expiation n’est pas une amende : elle est prescrite comme un sacrifice favorisant la capacité à jeûner à l’avenir.22

Le jeûne facultatif en Islam

En renonçant à la satisfaction légitime de ses désirs pendant un mois, l’on acquiert également le pouvoir et la volonté à renoncer à tout plaisir illégitime. En Islam, le jeûne n’est pas limité au mois du Ramadan. Les jeûnes facultatifs, pratiqués par les prophètes et les saints, furent source de grandes bénédictions et de faveurs divines. Le Saint Prophète Mohammadsa, le Messie Promisas, Jésusas, Moïseas ou Davidas, avaient pour habitude d’en accomplir : ils démontrèrent que cette pratique est appréciée par Dieu et permet d’atteindre les sommités de la spiritualité.

Le jeûne du Ramadan est un devoir fondamental et minimal exigé pour le respect des préceptes islamiques. Une fois cette condition remplie, ceux aspirant à une plus grande proximité divine observent des jeûnes facultatifs. Pareils actes sont récompensés à la mesure des efforts accomplis.

Le Saint Prophète Mohammadsa déclare dans un hadith qoudsi : « Allah, exalté soit-Il, dit : « J’ai  déclaré la guerre à quiconque sera hostile envers l’un de Mes bien-aimés. Jamais Mon adorateur ne se rapprochera de Moi par une œuvre plus aimable à Moi que par les obligations que Je lui ai imposées. Mon adorateur ne cesse de se rapprocher de Moi par les actes facultatifs jusqu’à ce que Je l’aime. Une fois Mon amour acquis, Je deviens l’oreille par laquelle il entend, l’œil avec lequel il voit, la main avec laquelle il saisit et le pied avec lequel il marche. S’il M’invoque, Je l’exauce. S’il se réfugie auprès de Moi, Je le protège. Je ne diffère pas une chose que Je dois faire autant que de retarder la mort du croyant, car Je sais qu’elle lui est pénible et rien ne Me répugne autant que de lui faire du mal. » 23

Étant donné les bienfaits spirituels du jeûne, les musulmans sont autorisés à jeûner quand cela est raisonnable. Il est cependant interdit de jeûner volontairement lors des occasions bénies et joyeuses en Islam telles que les vendredis et lors des deux célébrations annuelles de l’Aïd.

Les jeûnes facultatifs suivent le même schéma et nécessitent la même formulation d’intention que le jeûne du Ramadan.

Les chaleurs du Ramadan

Le mot « Ramadan » est dérivé du mot arabe رمض (ramd), qui signifie « intensément chaud » ou « brûlant ».24 Le mois de Ramadan est nommé ainsi pour les raisons suivantes :

celui qui jeûne ressent une forte chaleur à cause de la soif

l’adoration et la dévotion en ce mois brûle les traces du péché

la dévotion en ce mois produit en l’homme la chaleur de l’amour pour son Créateur et ses semblables. 25

Le Ramadan et le Saint Coran

Ce mois a été choisi pour le jeûne et l’avancement spirituel en raison de son étroite affinité avec la révélation du Saint Coran. En effet le Livre Saint déclare : « Le mois du Ramadan est celui pendant lequel le Coran a été révélé comme guide pour l’humanité avec des preuves claires sur la direction et le critère. »26 Ce verset signifie, entre autres, que la révélation du Saint Coran débuta au cours du Ramadan.

Une autre signification est que l’Archange Gabriel venait, tous les ans au cours de ce mois, répéter le Coran au Saint Prophètesa.27 Les musulmans s’évertuent en effet de conformer leur vie aux injonctions coraniques durant ce mois. Ce hadith souligne son importance : « Quand débute le Ramadan, les portes du paradis s’ouvrent et celles de l’enfer se ferment et les satans sont enchaînés. »28 En somme, celui qui comprend l’essence du Ramadan et respecte ses exigences ferme pour sa personne les portes de l’enfer et enchaîne ses démons. Cette période offrant tant de bénédictions s’accompagne aussi de grandes responsabilités.

Le Messie Promisas déclare : « Pendant ce mois, débarrassez-vous de tout souci ayant trait aux aliments et aux boissons. Détachez-vous de ces besoins et consacrez-vous entièrement à Dieu. Malheureux est celui qui, ayant reçu du pain matériel, néglige le pain spirituel. L’aliment physique renforce le corps ; la nourriture spirituelle, quant à elle, soutient l’âme et aiguise sa spiritualité. Cherchez la grâce de Dieu : elle ouvre toutes les portes. » 29

Les composantes du Ramadan

La journée typique du musulman pendant le Ramadan est active et disciplinée. Ci-dessous est une liste de pratiques que le musulman applique pendant le mois béni et après.

Tahajjoud : prières facultatives offertes individuellement après minuit et avant la prière de l’aube.

Saint Coran : le Livre Saint doit être lu quotidiennement. Les fidèles doivent tenter de faire, au minimum, une lecture complète du Coran pendant le Ramadan. Ils doivent aussi assister aux sessions d’études et d’exégèses du Coran selon leurs disponibilités.

Tarawih : prières facultatives offertes la nuit en congrégation. Celles-ci peuvent être offertes en lieu du Tahajjoud.

Souhour : repas traditionnel pris avant l’aube le jour du jeûne.

Iftar : repas de la rupture d’un jeûne.

I’tikaf : retraite spirituelle durant les dix derniers jours du Ramadan, de préférence à la mosquée.

Layla-toul-Qadr (la nuit du Destin) : une nuit particulièrement bénie parmi les nuits impaires des dix derniers jours du Ramadan.

Aïd-ul-Fitr : fête islamique pour marquer la fin du Ramadan. Elle est célébrée par une prière en congrégation suivie d’un sermon.

Jeûnes du Shawwal : On peut suivre le jour de l’Aïd-ul-Fitr par six jours de jeûne facultatif, pendant le mois de Shawwal. Le Saint Prophètesa disait que quiconque respecte cette injonction sera récompensé comme s’il avait jeûné perpétuellement.30

Que Dieu permette aux musulmans de tirer les plus grands profits spirituels de ce mois béni. Amen !

Bibliographie et notes :

  1. Oxford Dictionaries Language Matters, sous Fasting
  2. Encyclopedia Britannica and Wendy Doniger, Britannica Encyclopedia of World Religions, Chicago, IL: Encyclopaedia Britannica, 2006, p. 348
  3. Le Saint Coran, chapitre 2, verset 184
  4. J. Johnson, Oxford Dictionary of Hinduism, Oxford, Oxford UP, 2009, p. 335
  5. Nicholas De Lange, An Introduction to Judaism, Cambridge, Royaume-Uni, Cambridge UP, 2000, p. 105
  6. Lévitique, chapitre 23, verset 27
  7. Nicholas De Lange, An Introduction to Judaism, Cambridge, Royaume-Uni, Cambridge UP, 2000, p. 105
  8. Deutéronome chapitre 9, versets 9 à 18
  9. John Strong, The Buddha: A Short Biography, Oxford: Oneworld, 2001, p. 83
  10. Heng Sure, A Buddhist Perspective on Fasting, Urban Dharma-Buddhism in America. https://www.urbandharma.org/udharma9/fasting.html (dernier accès : 03 juillet 2014)
  11. Encyclopedia Britannica and Wendy Doniger, Britannica Encyclopedia of World Religions, Chicago, IL: Encyclopaedia Britannica, 2006, p. 348
  12. Matthieu, chapitre 4, versets 1 à 2
  13. Jaroslav Pelikan, Britannica Encyclopedia of World Religions, Chicago, IL: Encyclopaedia Britannica, 2006, p. 658
  14. Mirza Ghulam Ahmadas, Malfuzat, vol. 5, Rabwah, Nazarat Isha’at Rabwah, Pakistan, p. 102
  15. Sahih Al-Bukhari, Kitab-us-Sawm
  16. Ibid
  17. Ibid
  18. Ibid
  19. Mirza Masroor Ahmad, Les bénédictions du Ramadan, sermon du 12 juillet 2013, (www.islam-ahmadiyya.org)
  20. Le Saint Coran, chapitre 2, versets 185 à 186
  21. Le Saint Coran, chapitre 2, verset 185
  22. Mirza Ghulam Ahmadas, The Essence of Islam, 2., Tilford, Islam International Publications, 2004, p. 313
  23. Sahih Al-Bukhari, Kitab-Ur-Riqaq
  24. Hazrat Mirza Bashir-ud-Din Mahmoodra, The Holy Qur’an with English Translation and Commentary, vol. 1, (2 : 186),  Tilford, Islam International Publications, 1988), p. 239
  25. Ibid
  26. Ibid
  27. Ibid
  28. Sahih Al-Boukhari, Kitab-Us-Sawm
  29. Mirza Ghulam Ahmadas, The Essence of Islam, 2, Tilford, Islam International Publications, 2004, p. 316
  30. Sahih Al-Muslim, Kitab-us-Siyam
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